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LES BOUTS DE BOIS DE DIEU

djerbavacances Par Le 15/04/2015 0

Dans Non classé

," Nous sommes bien misérables,car le malheur,ce n'est pas seulement d'avoir faim et soif,le malheur,c'est de savoir qu'il ya des gens qui veulent que tu meures de faim."c'est en commentaire d'un de mes articles sur ce superbe bouquin de OUSMANE SEMBENE que j'ai reçu ces mots ... lhébergeur mongenie ayant arrete nos blogs je n'ai pu que recuperer mes articles ..dommage !

  Lentement je viens de refermer mon livre comme à regret , comme l'on quitte après quelques jours de vacances un lieu qui nous a marqué ,des gens que nous avons appris à aimer , à comprendre...Le cri cri des cigales a rempli le silence des résidences du "Vatican". Le claquement sec du coup de feu résonne encore dans ma tête...Que sont ils devenus depuis ,ces hommes et ces femmes avec qui j'ai partagé quelques heures de leur vie. Les toubabs , les blancs ,une fois rapatriés en France, une fois qu'ils n'étaient plus dans "l'émotion" ont ils compris que cette grêve aurait pu s'achever autrement. ..On ne peut rester indifférent en lisant ce récit parce qu'on sait que cette lutte pour des droits , quelques décennies plus tôt les français la menaient , sur leur propre territoire..Rappelons nous des couteliers de Thiers , des canus de Lyon ,des tanneurs de Maringue...et la liste serait longue.

Regardez ! là sur le vieux cliché , les hommes à chapeau , les bourgeois qui posent pour la photo ,leurs épouses sont  probablement dans leur demeure et les enfants à l'école en cette heure matinale ...et là ,bien plus nombreux , les hommes à casquette , les ouvriers, un peu en retrait on voit les femmes, et accrochés à leurs jupes leur "marmaille" .

Eux aussi ont fait grêve parce que les femmes et enfants étaient sous payés ,parce que le travail était harassant pour un salaire de misère et qu'il fallait tirer le diable par la queue pour survivre. Les accidents étaient nombreux et laissaient les familles dans le désespoir . Ils essayaient de rendre leur vie  de labeur moins douloureuse , ils espéraient une vie meilleur que leurs 14 H 6jours sur 7 pour leurs enfants .

A l'époque du livre l'Afrique occidentale francaise , le soudan où se déroule le recit était la France , et  cette différence entre  petit peuple et famille plus aisée était marquée ici par la différence de couleur de peau.

C'est tout à fait par hasard que je suis "tombée" sur ce livre parmi d'autres que quelqu'un m' avait donné pour la bibliothèque des ecoliers de Tin essamed ou de l'ecole songhoi de gao . Le livre est bien trop difficile pour des enfants de Moins de 12 ans dont le français en plus ,n'est pas vraiment la langue maternelle. En lisant le nom de l'auteur j'ai remarqué que c'était le même que celui du cinéaste dont je vous ai mis en ligne l'un des films .Alors j'ai ouvert le livre ,...je suis retourné au Mali quand il s'appelait Soudan et j'ai rencontré au fil des pages M Leblanc qui n'est jamais parvenu à se faire comprendre des africains, Sounkaré le gardien ,Bakayoko et tant d'autres....

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Très beau livre au demeurant ,il nous raconte une page d'histoire peu connue :la grève des cheminots au Mali en 1947. Car n'oublions pas qu'à cette époque le mali faisait partie de l'Afrique occidentale française.
Je vous en ai vaguement parlé dans un précédent article ...voilà quelques lignes supplémentaires.
La France avait du mal à se relever après la guerre de
1939-1945 : les caisses étaient vides , les greniers aussi car
les récoltes avaient été mauvaises,  la crise se faisait sentir
dans toutes les couches sociales, des familles se retrouvaient sans homme à une époque où la femme ne quittait que
rarement le foyer pour "gagner sa vie" ....
Mais la métropole n'avait pas été la seule touchée par la guerre; les colonies et protectorats avaient aussi fait cet effort de guerre que l'on demandait et pour ces pays où le blanc disons le était bien mieux payé que la personne de couleur là aussi on
souhaitait du changement.
Le mali avait gagné la guerre comme nous , mais leur misère
était toujours aussi grande et leur différence de statut , malgré leurs hommes morts au combats( + l'effort de guerre par les denrées envoyées en France , et pour le travail en usine pour
le matériel nécessaire aux combats) ,n'avait pas changé.
Dans les colonies on avait privilégié les cultures de certains produits plutot que d'autres , il fallait beaucoup de caoutchouc
par exemple pour les vehicules militaires ...et les pays s'étaient retrouvés avec des terres cultivables utilisées pour autre chose que les denrées habituelles:sorgho ,mil etc...
Rappelez vous de l'épisode tragique du camp de THIAROYE ,
dont un temps j'ai pu vous proposer le film tourné par oumane Sembene et que, malheureusement pour ceux qui ne l'ont pas vu, Dailymotion a retiré de ses pages et ne peut qu'être acheté
(cliquer ici ,ce n'est pas un partenaire du projet "ecoliers du cote de gao" mais je vous donne quand même le lien!!)

Retrouvez mes articles sur les tirailleurs sénégalais et le film
de bernard Simon .N'oublions pas que ces hommes ne s'enrôlaient pas toujours par conviction ou choix mais étaient
"pris" dans les villages comme autrefois on le faisait des marins dans les ports!
En France après la guerre l'activité reprend, le syndicalisme se
fait plus criant , on le retrouve dans la construction et réparation navale , sur les ports chez les dockers, dans les services maritimes et la sncf, les huileries,les usines de métallurgie ..
. Les uns entrainent les autres et les grèves se multiplient.

Ousmane sembene  s'est éteint en 2007(le 9 juin) mais il laisse derriere lui des pages d'histoire écrites ou filmées comme lui seul savaient les exprimer .Pour lui le cinéma ne devait pas être un seul divertissement , le camp de Thiaroye dont j'ai parlé plus haut nous le montre bien .Ses écrits aussi , sont des pages de vie . Il y aborde des sujets brulants comme dans "les bouts de bois de dieu" .
Son écriture et sa façon de filmer ont la lenteur parfois de la vie africaine .Ne dit ont pas là bas "vous avez la montre ,j'ai le temps " . Cette nonchalance qui est peut être un peu pesante pour des européens qui courent après le temps nous met vraiment dans le bain de la manière de vivre là bas .

ousmane SEMBENE est né le 8 janvier 1923 à  Ziguinchorau Senegal . il était français car né dans une des 4 communes du senegal (source ici)
A 12 ans , il quitte l'ecole pour se retrouver face à une vie riche d'expériences : il fera mille métiers , sera docker  comme journaliste,  connu du monde entier pour ses livres et films , ...

Adolescent il croise des syndicalistes qui lui expliquent leur idées de la société, il gardera en lui cet "enseignement" : fervent communiste ,il teinte largement  certains de ses écrits par ses pensées politiques.
En 1942 il est appelé sous les drapeaux dans la compagnie des tirailleurs sénégalais (à verifier)
Après l'épisode de la greve des cheminots en 1947 dont il tirera
le roman les bouts de bois de Dieu, rare livre qu'il n'ait pas porté
à l'écran, il part en France comme clandestin .
Il adhere à la CGT et au Parti communiste français, milite contre
la guerre en Indochine et pour l'indépendance de l'Algérie.
C'est vers les années 60 que le cinéma le tente ,il part en ex
URSS pour y apprendre le métier pendant une année.
Quelques mois avant sa mort à Dakar il reçoit la légion d'honneur en France

......
ses livres et films sont nombreux , certains ont plus fortement marqué le public comme par exemple
Mooladé 2004 au festival de cannes en 2004

le camp de Thiaroye malgré un très bon casting n'a pas connu
de succès (à verifier mais je crois qu'il a été interdit en France comme le fut en son temps le film retraçant une page noire
de la guerre de  14-18: le pantalon)

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LE LIVRE

L' Afrique est à la croisée de deux époques , c'est encore la tradition qui veut que "les plats en  fer affaiblissent la virilité des hommes" ou  les gris gris dans les cheveux de Ad'jibid'ji
adorable gamine .
Nous sommes à Bamako et cette première partie du livre ,
est la mise en place des personnages et de ce qui va les
souder ou les séparer : la grève .
Ils sont cheminots, sur la ligne qui joint Dakar à Koulikoro au soudan français et qui traverse des terres ancestrales que la compagnie s'est appropriée... Ils font partie du peuple noir ,
cela marque toute la différence chez ces employés du chemin
de fer , entre les salaires et les droits sociaux des uns et des autres.
Nous croisons les protagonistes que nous allons apprendre
à connaitre au fil des pages :
Niakoro, vieille femme qui a toujours un regard vers le passé, quand les jeunes écoutaient les anciens, elle habite dans la concession de son fils Ibrahima Bakayoko, fervent syndicaliste militant, avec sa belle fille Assitan et Ad'jibid'ji ,une gamine bien plus interessée par les palabres des hommes sur les
prochaines grèves que par la lessive, les courses ou autres travaux ménagers.
Après Bamako nous voilà à Thies autre creuset de grévistes.
Là se trouvent les ateliers des chemins de fer , et les familles vivent pour la plupart dans un dénument presque total au milieu d'un paysage  apocalyptique en certains lieux ,avec  un air
chargé des fumées du charbon ...(ne les appelait on pas les "gueules noires" en France)

Le récit est parsemé de mots ouolof , bambara pour lui garder toute son authenticité , nous rappelant ainsi que le Soudan d'autrefois,  comme le Mali et le Sénégal d'aujourd'hui , sont un melting pot d'une multitude d' ethnies ( peulhs, berbères ou touareg, bambara etc..) et que le français n' était utilisé que par une certaine partie du peuple et certainement pas des femmes !

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vous avez des renseignements sur l'epoque dont parle le livre , vous connaissez exactement les revendications des grevistes  et ce qu'ils ont obtenu .
vous connaissez la vie des cheminots en france ou au soudan
à cette même epoque
si vous avez lu ce livre , vous êtes prof , prenez la parole pour
nous en parler ...beaucoup d'eleves me contactent pour que
je leur vienne en aide , dommage qu'aucun d'eux après
correction  de leur devoir n'ai eu la gentillesse de nous
en faire parvenir le texte
merci de nous faire part de votre "savoir"

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à propos de mon article sur le camp de tiaroye ,une précision que je ne pouvais mettre avant que vous ayez vu le film sur les tirailleurs sénégalais , ils ont été 1200 à être ainsi fusillés, dont la moitié étaient de la région qui allait prendre le nom de Mali

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